Le nombre d’adolescents stressés, voire angoissés, de ne pas réussir à l’école ne cesse d'augmenter. Une situation amplifiée par la crise sanitaire.
La respiration jouant un rôle essentiel à notre bien-être, les enseignantes Mathilde Bernos et Emilie Top-Labonne ont développé la méthode Respir’Ado, basée sur 5R : ressentir, respirer, remuer, relaxer, réaliser. Leur livre repose sur cette méthode pour aider les jeunes âgés de 10 à 15 ans à surmonter leur stress et à mieux gérer leurs émotions. Des espaces de réflexion amènent le lecteur à mieux se connaître et savoir ce qu’il veut. Des activités de relaxation, respiration, yoga et créativité, l’aideront à se détendre, se concentrer et accueillir ses émotions.
Respir ’Ado propose un instant à soi essentiel pour tous les jeunes dans cette période de construction de leur identité.
Pourquoi pratiquer la relaxation en classe ? Qu'est-ce que cela apporte aux élèves, et à l'enseignant ?
Nous exigeons souvent des élèves qu’ils se tiennent tranquilles, comme si cela allait de soi, mais nous-mêmes, adultes, arrivons-nous si facilement à trouver le calme ? Nous nous sommes demandées comment les y aider, en leur donnant des outils, pour apprendre à accueillir ses émotions, se recentrer, renforcer sa confiance en soi, se sentir bien... Les bienfaits sont multiples.
La relaxation fait partie de ces outils, comme d'autres méthodes : le yoga, le Qi Gong ou la méditation de pleine conscience, qui permettent de faire une pause, respirer et observer ses ressentis.
Quand ce genre de travail est proposé aux élèves, l'enseignant en profite également. Cela améliore généralement le "vivre ensemble" et les relations d'élève à élève ou d'élève à enseignant s'en ressentent rapidement.
D'où vient la méthode Respir'Ado, comment l'avez-vous créée ?
Nous travaillons régulièrement ensemble mais nos pratiques diffèrent, même si elles ont des points communs : l’observation et l’expression des ressentis, la respiration, les postures corporelles, la relaxation et la créativité. La méthode « Respir’Ado » s’en inspire et propose cinq types d'exercices différents, à enchaîner ou faire séparément. Nous avons donc décidé dès 2017 de créer cet ouvrage, car aucun ne correspond aux besoins des ados. Nous avions envie d’un livre dans lequel les adolescents puissent puiser, comme dans une boîte à outils.
Que procurent ces exercices ?
La méthode repose sur une prise en compte de l'adolescent dans sa globalité. Les adultes qui l’utilisent doivent se questionner au préalable sur leurs intentions et prendre certaines précautions. La bienveillance et l'écoute sont essentielles.
Quelles sont les conséquences de la crise sanitaire chez les jeunes ?
Les adolescents, comme nous tous, doivent faire face à une période anxiogène. Notre liberté est entravée : dans nos rapports aux autres, nos mouvements, notre temps et même dans notre respiration ! Cela se traduit par une agitation, des tensions. Plus que jamais, le recours à des pratiques de bien-être peut aider à traverser ces contraintes, dont nous espérons voir la fin très vite ! Quand on ne peut plus se tourner vers l’extérieur, car les lieux de divertissements sont fermés, les moments de convivialité et horaires de sortie limités, il n’est d’autre alternative que de revenir à soi. Nous citerons Jacques Lusseyran, « La joie ne vient pas du dehors. Elle est en nous quoi qu’il arrive. La lumière ne vient pas du dehors. Elle est en nous même sans les yeux ». Quelle que soit la dureté de ce que nous traversons, il existe en nous une lumière, une richesse vers laquelle nous pouvons nous tourner. Ces pratiques nous invitent à la découvrir.
Quels sont les principales craintes des adolescents et comment y répondez-vous ?
Certaines craintes sont liées à l’école (peur de l’échec, des examens, de certains profs ou élèves), d’autres à la famille, l’amitié, ou à l’avenir professionnel. Les adolescents sont entre deux mondes : celui des enfants, capables de s’ancrer dans le présent, et celui des adultes, vite happés par la nostalgie du passé ou l’angoisse de l’avenir.
Les pratiques de bien-être invitent à observer, accueillir les craintes comme les autres émotions, en apprenant à reconnaître les sensations corporelles et les pensées qui les accompagnent, ainsi que les besoins qu’elles cachent.
Cela passe par un enrichissement du vocabulaire, une compréhension de nos fonctionnements et une verbalisation. Mais surtout par le corps et la respiration, au-delà de la compréhension purement intellectuelle vers laquelle se tournent ordinairement principalement les apprentissages scolaires.
Ressentir, respirer, remuer, relaxer, réaliser, sont autant de manières de répondre aux besoins, cachés derrière des émotions parfois difficiles à vivre.
Auriez-vous un conseil à donner aux parents ?
La détente peut se proposer, pas s’imposer. C’est une remarque pour les parents, autant que pour les professionnels travaillant avec des adolescents.
L’enthousiasme est communicatif quand il est sincère ! C’est pourquoi nous incitons les adultes à partager les pratiques qu’ils expérimentent et apprécient eux-mêmes. Nous pouvons aussi les inviter à la patience, la tolérance et la confiance. Les adolescents peuvent refuser, résister, ou donner l’impression que cela ne sert à rien. Les graines semées aujourd’hui mettront parfois du temps à germer. C’est un lent cheminement, pour les jeunes comme les moins jeunes, entre moments de doutes et découvertes palpitantes... Le projet de toute une vie !
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